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Le Lady Margaret

Notre sagesse est douce comme le miel, goûte et comprends.

TRANSMISSION - activation du signal de Nouvelle-Angleterre - RÉCEPTION - activation de la fréquence de CaledFwlch - LA TEMPÊTE EST ARRIVÉE, LE PETIT BATEAU A ÉTÉ BALLOTE - activation de la syntaxe échinodermique - TÉMOIGNAGE - Le Lady Margaret.

Une histoire d'horreur est amarrée au port de Kingsmouth. Elle s'intitule le Lady Margaret. Écoute.

Iii-ah ! Iii-ah-ah-ah-ah-ah !

Cette histoire est codée dans le cri des mouettes. Elles dévorent les cadavres boursouflés et, dans l'alchimie de leur corps, ces secrets morts fusionnent avec l'essence des oiseaux.

Owah ! Owah-ow-ow-owah !

Peux-tu déchiffrer le code, enfant du miel ? Non ? Ton cerveau n'en est encore qu'au stade larvaire et tous ces lobes ne sont pas développés, mais ils s'éveillent quand tu entends le cri des mouettes. Nous pouvons le déchiffrer pour toi. Le sang goutte dans les vagues de la marée, dilué un million de fois, et pourtant, son goût est reconnaissable entre mille. Nous allons le régurgiter pour toi, afin de te nourrir comme une oiselle le fait pour ses oisillons.

Activation de la cadence des cris de mouettes.

Tout le monde croyait que le bateau de pêche était perdu. Et puis, il est rentré au port, avec plusieurs semaines de retard. Mais son retour n'a apporté aucun réconfort, non. Juste la brume.

Iii-ah-ah-ah-ow-ow-owah !

Une terrible tempête avait emporté le Lady Margaret, des nuages noirs et des vagues hautes comme des maisons qui s'abattaient sur le pont. Les marins dirent leurs prières, les dernières. Les flots déchaînés ballotèrent le chalutier et les hommes attachèrent tout ce qui pouvait l'être, dans l'espoir de sauver leur cargaison. L'un des leurs fut emporté par-dessus bord et, incapables de le sauver, ils ne purent que voir sa tête remonter à la surface. Une fois. Deux. Mais pas trois.

La tempête se calma enfin, et le Lady Margaret était toujours là. Une brume épaisse se leva, insidieuse comme un cancer. Les instruments s'affolèrent. Les marins tentèrent de manœuvrer, mais il leur était impossible de savoir où ils se trouvaient et dans quelle direction ils allaient. Ils étaient à la merci de l'océan.

Le temps passe, d'abord en heures, puis en jours.

La brume finit par s'écarter, tel le rideau d'un spectacle macabre, pour révéler un cimetière de navires. D'acier rouillé ou de bois pourri - boutres, drakkars vikings, frégates modernes, pétroliers et paquebots de luxe - tous dérivaient dans les mêmes eaux, embarcations de toutes les époques et de toutes les cultures rassemblées là et couvertes de rouge.

Et ensuite, enfant du miel ? Les mouettes sont des menteuses compulsives. Disons juste qu'un objet fut découvert, flottant sur un radeau. Et disons qu'un homme, que nous appellerons Joe Slater, plongea pour le récupérer. Disons enfin qu'à cet instant, la brume se referma sur le Lady Margaret tel un poulpe vampire.

Peut-être le bateau se mit-il à tourner sur lui-même, comme s'il était pris dans un maelström naissant. Ou peut-être les marins avaient-ils vu, parmi les coques en putréfaction, se mouvoir des silhouettes minces et gluantes qui se tordaient dans d'abominables convulsions. Couvertes d'algues rouges, elles ressemblaient à des loutres de mer zombies dévorant les bruits qu'elles trouvaient dans les crânes des équipages des navires perdus. À moins qu'il ne soit agi d'illusions d'optiques dues à la brume et à l'obscurité.

Des fragments de récits anciens résonnent au cœur des cris des mouettes, des histoires de marins évoquant des choses atroces venant à la vie dans des corps morts, au fin fond de l'eau noire. Des âmes putrides dans des enveloppes de chair délabrées, des morts agités et affamés, au regard laiteux. Quelques mouettes se souviennent même de leur nom. Draug-draug-draug-draug !

Supposons que le Lady Margaret chercha à fuir à la fois le maelström et les monstres. Son moteur reprit vie, certains de ses instruments regagnèrent un semblant de lucidité et le petit chalutier retrouva le chemin de Kingsmouth. Les pêcheurs gardèrent l'étrange objet qu'ils avaient trouvé. Plusieurs voulaient le vendre sur Internet, les autres préférant l'apporter à l'académie d'Innsmouth pour l'y faire identifier. Ceux-là l'emportèrent, et il fut décidé d'y amener l'objet sans tarder.

Mais le lendemain, la brume arriva. Le temps passe, d'abord en hurlements, puis en gémissements.

Joe Slater est le seul survivant. Un par un, ses compagnons ont péri, comme les protagonistes d'une comptine pour enfants. Chacun d'eux est désormais une minuscule histoire dans le ventre d'une mouette différente. Sauf Joe. Mais est-il encore Joe ? À peine. Peut-être est-ce l'objet, ou la soupe primordiale dans laquelle il a dû nager pour le récupérer, qui lui ont transmis le mal de l'huile marine.

Cela commença par de terribles maux d'estomac qui lui donnèrent l'impression qu'une couvée de lamproies était en train d'éclore dans son ventre. Puis, Joe se mit à entendre les myxines qui chantaient dans les grandes fosses marines, même quand il affirmait le contraire et quand, fou de douleur, il cassait spasmodiquement les cotons-tiges avec lesquels il essayait de nettoyer ses oreilles ensanglantées. La démence se répandit dans son esprit comme le mal des profondeurs. Puis vint le temps de la chair pâle et flasque. Et enfin, celui des bernaches et des concombres de mer greffés à même sa peau. Aujourd'hui, Joe n'est que brûlures et démangeaisons, alors que diverses espèces de corail se battent à grands renforts d'enzymes digestifs pour s'emparer de son torse. Et des choses innommables s'échappent de ses cavités osseuses pour se faire dévorer par d'autres, plus atroces encore, vivant en symbiose avec d'autres parties de son corps.

Et même si les mouettes lui hurlent mille histoires, la seule que Joe entend est celle qui fait "Draug-draug-draug-draug-draug !"

rédigé par Monade le 13 August 2013
mis à jour le 13 August 2013